L'OMBRE DE LA GUERRE
Encore elle ! Après avoir fourré son voile en Tchétchénie, puis en Afghanistan, voilà Anne Nivat, avec son équipe, en train de nous faire visiter l’Irak dans un fauteuil, pour notre bon plaisir, non pas le "plaisir de se plaire" en voyant défiler ces images fortes, mais celui de comprendre enfin ce qui s’est passé, et de tenter de deviner ce qui va se passer.
Car ses interlocuteurs - qu’elle connait bien - sont de grande qualité. Ce film d’Anne Nivat date de 2012 : il se situe après la guerre de la veille, mais avant la guerre du lendemain. Car le rêve oriental change : en 2015, ce n’est plus le bédouin en chameau qui blatère, mais la kalach en quatre quatre qui déblatère.
https://www.youtube.com/watch?v=SOeUzuMDf-I
Quand Anne Nivat vient en Irak, elle est toujours seule, sans autre protection que celle des familles qui l’accueillent. Elle est volontairement discrète. Son objectif : savoir si la guerre est vraiment bien finie. Les Américains ont dissous l’armée irakienne, mais la résistance s’organise, et en particulier à Faludja, fief d’Al Quaida.
Opinion de Hamid Al Jarri : l’Amérique a envahi l’Irak pour lui vendre la démocratie, mais ils ont échoué … les Irakiens, si ils sont exposés à l’humiliation sont prêts à aller jusqu’au sacrifice de leurs vies.
Mais depuis le départ des Américains, l’Irak n’a pas réussi à trouver un équilibre stable. Ce pays est formé de plusieurs peuples, de plusieurs langues, de plusieurs religions … et la mayonnaise n’a pas pris, la société civile est en convalescence, les milices détestent la culture ; pour oublier on se jette à corps perdu dans l’instant présent, beaucoup d’étudiants disent « personne ne veut rester ici » ; les Irakiens sont amers et déçus et attendent de leur gouvernement un effort herculéen, ils ont besoin d’un leader tel que Mandela, de voir le futur autrement que par les lunettes du passé. Ils ont une véritable passion pour les sujets religieux, mais cela suffit-il ?
On aimera que Anne Nivat revienne d’Irak un jour pour nous dire que tout va mieux. Las, depuis 2012, les améliorations sont virtuelles, au rythme des explosions. Une Irakienne résume : « depuis 1981, nous ne vivons pas … comme des gens normaux. »
En attendant, il faut voir et revoir ce film.